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A la veille des championnats de France, où il sera attendu comme une véritable star, Léon Marchand s'est prêté au jeu de la conférence de presse. Quelques jours après son retour sur le territoire français, le nageur des Dauphins du TOEC s'est confié sur sa relation avec la brasse, son statut au sein de l'équipe de France ainsi que sur son état d'esprit, à l'aube de championnats qualificatifs pour les Mondiaux de Fukuoka. Un échange entre lucidité et maturité, déjà rompu à l'exercice, même devant une horde de journalistes.

 

  • Léon, tu commences ta compétition dimanche avec le 200m brasse. Est-ce que les 2’08 sont accessibles ?

Oui, je pense que dans ma forme du moment je peux m’approcher de mon meilleur temps. L’année dernière, je l’avais fait aux championnats d’Espagne dans des conditions particulières. Donc je pense que je peux faire 2’08 demain soir. On verra car généralement, en brasse, il y a des jours avec et des jours sans. Je ne m’attends pas à grand-chose, je vais essayer de lâcher les chevaux demain soir en finale.

 

  • La brasse n’est donc pas une nage que tu maîtrises complètement ?

Il y a des jours où j’ai envie de m’engager en brasse et cela ne marche pas alors que dans les autres, quand j’ai envie, cela marche bien. Je n’ai fait que cinq ou six 200m brasse dans ma carrière donc je n’ai pas beaucoup d’expérience. Ce n’est pas comme un 400m 4 nages que j’ai fait des centaines de fois. C’est pour cela que j’ai un peu moins d’attente.

 

  • Pourtant il y a de la brasse dans le 4 nages…

Oui, mais c’est différent. La brasse du 400m 4 nages intervient après 200m déjà à fond (rires), donc le rythme de nage, de coordination des jambes et des bras n’a rien à voir.

 

  • Est-ce une nage assez naturelle chez toi ?

Oui, je pense. J’ai quand même eu un déclic quand j’étais petit. J’ai eu un déclic au niveau du mouvement, j’ai réussi à être plus facile dans l’eau, dans la glisse, etc. Je ne perds pas beaucoup d’énergie donc j’arrive à rester longtemps à un bon rythme.

 

  • Sur quelle nage penses-tu avoir le plus progressé cette année ?

Je pense que c’est dans la répétition des longueurs avec le nombre de coups de bras. C’est très technique, mais avant je rajoutais deux-trois coups de bras à la fin de mes courses alors que maintenant j’arrive à rester sur le même nombre. Je suis donc plus puissant sans perdre d’énergie, ce qui est le but. Je pense que cela peut aussi m’aider dans le 4 nages. J’aimerais bien essayer de passer en dessous de 1’07 sur mon passage au 200m 4 nages, mais on verra bien.

 

  • Autrement, sur quelle nage penses-tu avoir le plus de marge de progression ?

Je pense que la nage sur laquelle j’ai le plus de marge est le crawl. Sur mon meilleur temps sur 400m 4 nages, j’aurais vraiment pu gagner du temps sur la partie en crawl. Je pense que je peux m’entraîner un peu plus en crawl, avoir une nage plus grande, plus profilée pour pouvoir mieux finir mes courses.

 

  • Cela fait un moment que tu n'as pas nagé en compétition en France, qu’est-ce que cela te fait de retrouver les bassins, ici, et tes coéquipiers de l’équipe de France ?

C’est très sympa, le principal changement est de retrouver le TOEC, surtout. C’est toujours une grosse famille qui se déplace, chaque année, aux championnats de France. Cela faisait deux ans que je n’avais pas participé avec eux aux compétitions et là ça fait plaisir. J’ai tous mes potes et il y a toujours une très bonne ambiance dans l’équipe.

 

Photo : KMSP / Stéphane Kempinaire

 

  • Est-ce que tu sens que tu as une responsabilité, déjà, dans cette équipe de France ?

Pas forcément. En général, les gens disent que je suis un leader mais je suis plus un leader par ce que je fais dans l’eau, dans ma performance. En général, le 400m 4 nages est le premier jour et c’est toujours bien de lancer une dynamique dans le groupe. Je le vois comme ça : si je fais le job dans l’eau, les autres seront inspirés et influencés par ce que je fais. Mais après on a les capitaines dans le groupe.

 

  • Tu ne te sens donc pas capable pour l’instant de prendre ce leadership ?

Je pourrais, mais je le ferai plus tard je pense. Pour l’instant ce n’est pas mon rôle, je n’ai pas trop d’expérience en cela. Il y a surtout des gens qui le font beaucoup mieux. J’aime surtout pouvoir montrer comment j’approche mes courses, ma façon d’être relâché avant les compétitions et de pouvoir lancer la compétition avec une belle performance.

 

  • Donc peut-être un peu plus tard dans ta carrière...

Oui, je pense. Quand je serai grand, quand je serai un adulte (rires). Quand j’aurai plus d’expérience, que je saurai parler un peu mieux en public, parler aux gens, les motiver, peut-être que je pourrai. Mais là, ce n’est pas trop mon truc. Aux Etats-Unis, dans mon groupe, il y a vraiment trois leaders, mais nous avons tous la même voix, tous le même droit de parler. Pour le coup, j’inspire plus par ce que je fais dans l’eau qu’autre chose. Il y a eu des moments où j’ai pris la parole, mais j’aime bien qu’on ne prenne pas trop au sérieux les choses (sourire), c’était assez fun quand je le faisais.

 

  • Bob Bowman va arriver au cours de ces championnats. Est-ce important qu’il soit à tes côtés sur cette compétition ?

Oui, c’est clair. Après on s’entraîne à faire cela toute l’année donc je n’ai pas forcément besoin de lui maintenant, même si c’est une aide supplémentaire. Il va pouvoir driver un peu tout et garder cette structure que j'ai tout au long de l’année. On passe du bon temps, on analyse mes courses, on voit ce qui va et ne va pas, on calibre pour la suite.

 

  • Tout est justement plus professionnalisé autour de toi, entre l’entraînement et la gestion des médias. Comment le vis-tu ?

Cela fait partie du job. On ne s’en est pas vraiment rendu compte, au début, parce qu’il n’y avait pas de médias qui me suivait (rires). Cela fait partie de mon travail de nageur professionnel de faire attention à ce que je dis, ne pas prendre trop de temps avec les médias, essayer d’être focus sur ce que je fais dans l’eau et à l’entraînement. Surtout passer du temps avec les potes, m’amuser, c’est ça le principal. Il ne faut pas s’éloigner de tout ça.

 

  • As-tu besoin de ce plaisir pour avancer ?

Oui, je pense que je ne pourrais pas m’entraîner tout seul. Ou alors pendant une période assez restreinte (rires). J’ai besoin de gens à qui parler pendant l’entraînement, des gens qui me stimulent aussi. Que ce soit à l’entraînement, en classe ou dans ma vie de tous les jours : c’est comme cela que j’avance.

 

  • Te fixes-tu des défis pour te permettre d’aller chercher plus loin dans la performance ?

Oui, c’est clair. J’ai besoin d’avoir un petit challenge, quelque chose à aller chercher. Quand c’est trop facile, en général, cela ne marche pas. J’ai besoin aussi d’avoir une petite part de doute. Peut-être 70% de confiance et 30% de doute. S’il n’y a pas le doute, en général, cela ne marche pas. S’il n’y a pas la confiance, c’est pareil. Je me pose tous les jours des défis, à l’entraînement ou en compétition. Et en natation c’est assez facile car nous avons les chronos, pas de juge.

 

Recueilli à Rennes par Louis Delvinquière

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