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Avec trois défaites (Pays-Bas, Espagne, Russie) et une victoire (Croatie) lors du tour qualificatif de l’Europa Cup (1er-4 février), l’équipe de France est éliminée de cette compétition. Mais que faut-il penser réellement du niveau des Bleues à l’issue de ce tournoi ? Réponses de l’entraîneur Florian Bruzzo.

Quel bilan fais-tu de ce tournoi d’Europe Cup qui était – il faut le rappeler – la première sortie officielle de la saison pour  l’équipe de France féminine ?

A la lecture brute des résultats, on constate qu’on est encore loin derrière les grosses nations, comme l’Espagne, la Russie ou les Pays-Bas (les Tricolores ont été respectivement battues 19-5, 22-5 et 18-4). Et qu’à l’inverse, on semble avoir fait la différence avec des formations plus faibles comme la Croatie. On gagne de 10 buts (15-5), mais en faisant beaucoup tourner et en économisant mes « cadres ». Géraldine Mahieu n’a joué, par exemple, que trois minutes dans ce match. Si on dépasse le stade des résultats bruts, on se rend compte qu’il y a un canevas, une trame de jeu qui permet de voir ce vers quoi on veut aller. Un jeu plus porté vers l’attaque en particulier. Dans le détail, on a pu voir aussi quelques bons passages face aux grosses équipes qu’on a rencontrées. On a eu, par exemple, plusieurs séquences de plusieurs minutes sans encaisser de buts. Que ce soit contre les Pays-Bas, vice-championne d’Europe 2016, l’Espagne, vice-championne du monde 2017, ou la Russie, médaillée de bronze à Rio et à Budapest aux derniers Mondiaux de Budapest.

Continuons à rentrer dans les détails : quels sont les points positifs que tu as vus dans le jeu produit par l’équipe de France au fil de ces quatre rencontres ?

Je dirais l’énergie, l’agressivité dont les filles ont fait preuve et qui nous a permis, par exemple, d’avoir une dizaine d’exclusions en notre faveur par match. On a pu le voir aussi avec les EDA de Godoy et de Shertanzonva, qui prouvent que l’Espagne comme la Russie se sont réellement employées contre nous. On l’a vu aussi avec le faible nombre de buts encaissés en pointe. Deux contre l’Espagne, un contre la Russie, je crois. De manière générale, l’équipe de France a montré lors de cette Europe Cup un changement profond de mentalité en refusant de subir, d’être passive. En ne voulant pas seulement ne pas encaisser de buts, mais en voulant en marquer aussi. On prend encore des contres, certes, mais c’est suite à des attaques organisées de notre part et à des shoots ratés. Je dirais qu’on est puni parce qu’on joue et non pas parce qu’on ne joue pas !

(KMSP/Julien Crosnier)

On a vu également pendant ce tournoi une Géraldine Mahieu de haut niveau, capable de rivaliser avec les meilleurs joueuses du monde. Tu es d’accord ?

J’ai vu chez Géraldine la même chose, les mêmes progrès que chez Mickaël Bodegas quand il est parti à Brescia la première année. Depuis septembre, qu'elle évolue dans le championnat hongrois, elle est devenue une vraie joueuse de water-polo. Beaucoup plus « professionnelle ». En particulier dans sa façon de faire au quotidien pour être performante, dans son approche de la compétition.

A contrario, quels sont les points négatifs ?

Il y a encore beaucoup, beaucoup de travail et de progrès à accomplir mais si je devais mettre l’accent sur un, je dirais qu’en règle générale, on a un retard à la réaction par rapport aux meilleures équipes. On ne nage pas moins vite, on prend surtout une demi seconde. Au plan individuel, il y a aussi encore quelques filles – pas beaucoup, mais quelques unes quand même – qui refusent la cage, qui ne prennent pas leur chance au shoot quand elles en ont la possibilité.

(KMSP/Stéphane Kempinaire)

Face à la Croatie, une nation plus faible que l’Espagne, le Russie ou les Pays-Bas, et même si l’équipe de France l’a largement emporté, on l’a vu aussi parfois embêtée au moment de la conclusion. Comment expliques-tu ça ?

Il y a, d’une part, une faiblesse récurrente au tir, mais il y a surtout le fait qu’au niveau international, on a plutôt l’habitude d’être dans une situation de résistance et non de domination. Et donc quand c’est à nous de prendre le jeu à notre compte, on n’a pas encore l’habitude. Ça fait partie des choses qui vont s’améliorer à force de travail et surtout en multipliant les matches. Je l’ai vu il y a encore quinze jours quand on est allé avec le centre d’entraînement (une douzaine de filles sont réunies depuis le mois de novembre à Nice sous la houlette de Florian Bruzzo, ndlr) en Italie pour jouer contre Bogliasco, actuel troisième club du championnat italien. Le premier jour, on s’est fait défoncer, le deuxième jour, on a fait -2 et le troisième, on a gagné !

En conclusion, tu dirais que ce tournoi laisse espérer de bonnes choses pour les semaines et les mois qui arrivent ?

Si tout le monde continue à travailler dans le bon sens comme c’est le cas depuis le début de l’année et si on récupère comme prévu Audrey (Daulé) et Clémentine (Valverde), je pense qu’on aura une bonne équipe cet été. Quand je dis ça, faut pas rêver non plus : on ne passe pas en quelques mois de -20 à +1 face aux grosses nations. Non, on devrait jouer la septième place aux championnats d’Europe et parvenir à faire jeu égal avec les meilleurs pendant une à deux périodes et pas seulement trois minutes par ci ou par là.

Recueilli par Jean-Pierre Chafes

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