La victoire 9-5 de l’équipe de France féminine de water-polo face à Israël n’a pas fait naître un enthousiasme débordant chez le sélectionneur tricolore Florian Bruzzo. Bien au contraire. S’il s’attendait à un match compliqué, celui qui est aussi directeur du water-polo, ne pouvait se satisfaire de la prestation de ses joueuses qui ont trop longtemps évolué « à deux à l’heure » face à une valeureuse équipe israélienne.
La victoire a mis du temps à se dessiner. T’attendais-tu à un match aussi compliqué ?
Je m’attendais parfaitement à ce type de match. Nous avons une ou deux joueuses blessées et il était prévu de donner du temps de jeu à des joueuses qui sont moins dans l’eau d’habitude. Nous avions préparé cela à l’entraînement et on savait que ce ne serait pas facile, parce que nous ne disposons d’aucune marge. Aujourd’hui tout le monde est très élogieux concernant notre progression et je pense que certains se laisse endormir par tout ça. La réalité c’est que nous sommes très loin du haut niveau. Il faut juste un peu plus de prise de conscience de cet état de fait.
Les joueuses ont mieux attaqué le troisième quart-temps. Que leur as-tu dit à la mi-temps ?
Je ne leur ai rien dit de spécial. J’ai simplement fait jouer les six qui ont disputé 32 minutes contre la Grèce en deuxième mi-temps.
S'agit-il de blessures contractées pendant ces championnats d’Europe ?
Nous sommes partis de chez nous depuis le 30 mai et les compétitions internationales sont longues. Ce ne sont pas des blessures très graves et nous devions profiter de ce match pour donner un peu de repos aux cadres. Malheureusement, en deuxième mi-temps, je n’ai pas pu le faire. Aujourd’hui, ce n’était pas une bonne journée.
Est-ce donc un problème de densité ?
Ce n’est pas une surprise. Aux derniers championnats d’Europe juniors, nous avons pris 25 buts contre tout le monde. C’est la réalité de notre water-polo. Il n’y a pas de densité ni de concurrence. C’est pour cette raison que je savais que ce serait difficile contre cette équipe d’Israël qui est accrocheuse, bagarreuse et qui fait beaucoup d’efforts pour développer le water-polo féminin. Nous ne sommes que la France.
Florian Bruzzo. (Photo: KMSP/Stéphane Kempinaire)
La préparation physique ne doit-elle pas également être digérée par les joueuses ?
Il faut arrêter de se cacher derrière son petit doigt. Aujourd’hui, les Israëliennes ont montré un état d’esprit fantastique, pendant que nos joueuses sont simplement contentes d’être-là. On est en équipe de France, on est bien. Ça fait rêver sur les réseaux sociaux et ça fait plaisir à papa et maman. What else ?
Malgré tout, l’année passée à Nice avec le collectif tricolore a-t-elle été profitable aux joueuses ?
Ça a évidemment changé quelque chose. Ça se voit physiquement, dans les performances en musculation, dans les séquences de jeu que nous sommes capables de produire. Mais il est difficile de changer tout un système en deux saisons et surtout de changer les mentalités.
Reste-t-il suffisamment de temps avec les Jeux Olympiques de Tokyo ?
Oui, il reste dix-huit mois avant le tournoi pré-olympique et nous sommes toujours dans ce cadre-là. Il reste suffisamment de temps, le tout est de savoir comment nous allons l’utiliser. Nous ne sommes pas plus bêtes que les autres et si nous nous mettons en ordre de marche, ça peut fonctionner.
Florian Bruzzo donne ses consignes à ses joueuses. (Photo: DeepBlueMedia)
Le groupe sera-t-il au complet pour le reste de la compétition ?
Ce ne sont pas de graves blessures, je voulais juste faire souffler certaines filles. Mais nous serons au complet pour les prochains matches et nous allons essayer de montrer un autre visage qu’aujourd’hui. Ce n’est pas tant dans le jeu que nous avons des difficultés, mais nous débutons le match à deux à l’heure. Ce ne sont pas de mauvaises filles et elles n’ont pas pris le match à la légère, mais le socle de tout, c’est la détermination et quand on leur dit qu’elles vont affronter les Pays-Bas ou l’Italie elles sont sur le qui-vive. Un peu moins contre Israël ou la Croatie.
L’objectif de grapiller des places dans le Top 8 européen est, malgré tout, toujours atteignable.
Je ne suis pas au fond du trou, je dis simplement que ce que j’ai vu aujourd’hui ne me surprend pas.
Recueilli à Barcelone par J. C.