Aller au contenu principal

Quand douze lycées français de l’Asie-Pacifique se rencontrent, début avril, pour la cinquième édition de l’Asia Pacific Swimming Competition (CAPN), les bonnes notes flottent dans l’eau et dans l’air. Sous l’œil conquis de leur marraine Solène Figues, venue en voisine de Nouvelle-Calédonie pour leur distiller conseils et encouragements, 272 nageurs de 10 à 19 ans ont plongé avec délectation dans un grand bain de jouvence. « Hong Kong ! Hong Kong !», lance une partie de la tribune survoltée, au départ d’une finale. Une autre lui répond : « Shanghai ! Shanghai ! ». Timidement, des malais « Kuala ! Kuala ! » tentent une contre-attaque ! Et les courses, majestueusement orchestrées par les organisateurs australiens, sont lancées dans un bassin de 25 mètres couvert.

Sur cette planète de la natation, les concurrents sont des lycéens des établissements français en Asie-Pacifique (1). Au fil de leur rendez-vous annuel, ils s’encouragent en français, affichent un esprit anglo-saxon au « fighting spirit » déjà bien aiguisé. Même si la plupart a une double nationalité, tous nagent pour leur ville actuelle d’appartenance, scandent son nom et secouent le drapeau de son pays d’attache. Au bord de leurs lignes, le drapeau français est invisible. Mais, le français est au bout de toutes les langues.

Professeur de sports à Singapour, Jean-Marc Oziol (48 ans), ancien spécialiste du quatre nages, est comme un poisson dans l’eau avec ses vingt-cinq élèves.  A Sydney, « lieu mythique s’il en est en natation », ce Haut-Savoyard participe pour la troisième fois à la CAPN. « Quand je suis arrivé au lycée de Singapour en 2013, j’ai lancé le club de natation avec seize nageurs. Aujourd’hui, nous en avons cent cinquante. Cette rencontre annuelle est très motivante pour nos gamins. C’est leur priorité de la saison, notre championnat du monde à nous. Ainsi, je peux leur apprendre à préparer un objectif sur la durée d’une saison, à s’affûter, à se concentrer en chambre d’appel, à gérer une course, à soigner leur récupération… Pour un entraîneur, ce rendez-vous vaut de l’or. » Grâce à deux bassins de 25 mètres au lycée, trois entraînements par semaine avec l’aide de sa collègue Christelle Bonnet, des parents motivés et investis qui suivent les courses de leurs enfants en direct sur les réseaux sociaux, Singapour est une des meilleures équipes de cette compétition.

Elève en 1ère S, Pierre Wartel (16 ans) en est son capitaine. Futur ingénieur en robotique, ce Franco-Vietnamien vit sa troisième édition après celle de Shanghai (2015) et Kuala Lumpur (2016). « J’aime l’esprit d’équipe très important lors de cet événement. Moi, je viens pour le plaisir, pour retrouver une grande famille. Étant capitaine pour la première fois, je me sens maintenant, un peu, le papa de toute mon équipe. A mon âge, avec ma petite taille, je sais que je ne serai jamais champion olympique. Mais je suis motivé, et animé par un certain enthousiasme à supporter mon équipe. Pour la plupart, nous nous connaissons depuis des années. Nous sommes avant tout des amis. Vivre un tel évènement ensemble nous marquera à jamais. »

Un des neuf professeurs de sports à Hong Kong, établissement à 2 500 élèves dont 70 nageurs, le Grenoblois Yann Lassus (38 ans) fait la même analyse. « Pour un entraîneur, cette rencontre est la cerise sur le gâteau. Je vis ma cinquième édition avec toujours le même bonheur de voir mes élèves échanger culturellement, sportivement et humainement dans un esprit festif. En rentrant, ils seront nos meilleurs ambassadeurs auprès de leurs camarades pour promouvoir la natation et le sport en général. La compétition sert surtout de bon et beau prétexte. Nous ne sommes pas dans le combat ni dans le compétitif, même si le niveau monte d’année en année. »

Chaque équipe sélectionne ainsi des élèves capables de véhiculer une bonne image de son lycée et démontrer un respect de ses valeurs. A 19 ans, Zai Xiang Ma en est sa figure de proue. Malgré ses chronos au-dessus du lot à l’image de son gabarit en hauteur et en largeur, cet ancien dossiste n’a pas voulu tourner le dos à sa dernière participation. Non, le Franco-Chinois a le sens du retour, et pas seulement dans sa ligne d’eau. « Il y a six ans, grâce à cette compétition, j’ai vraiment découvert la natation puis, un possible horizon dans le sport de haut niveau. » A l’époque, ce papillonneur était fermé comme une huître. Depuis, sa mue et son comportement sont cités en exemple. « Aujourd’hui, je m’entraîne six fois par semaine. Je participe aux championnats d’Asie. Mais, je garde un attachement très particulier pour ces échanges spéciaux avec les autres. Jamais, je n’ai envisagé manquer cette édition. »

Avec son gabarit prometteur pour les longues distances, n’ayant pas échappé à leur marraine Solène Figues (championne du monde sur 200 m nage libre en 2005), la Normande de Kuala Lumpur Marion Liégeois (15 ans) pourrait suivre l’exemple de Zai Xiang Ma. « Tout au long de la saison, cette ambiance nous porte littéralement pendant les entraînements. Au fil de son déroulement, elle nous pousse à donner le meilleur de nous-mêmes pour que notre lycée récolte un maximum de points. Ici, l’esprit d’équipe prime et tout le monde encourage tout le monde. » De saison en saison, le CAPN, affole les chronos jusqu’à créer « une natation à deux vitesses » qu’Antoine De Guernon (35 ans), professeur de sports à Phnom Penh perçoit « comme, peut-être, l’heure venue de l’organiser à deux niveaux. » Mais en attendant le clou de ce superbe spectacle, la course la plus attendue de la compétition reste le relais des entraîneurs. Toutes les gorges déployées, pas un élève n’en perd un centième.

A Sydney, Sophie Greuil

(1) Association pour l’Enseignement du Français à l’Etranger (A.E.F.E.) gère 499 établissements français sur 136 pays.

(2) Pour la petite histoire de la natation mondiale, Simon Vaslet, le bassin (le sien) drapé de son drapeau du Laos, a lancé son relais, vainqueur de cette cinquième édition avec son collège Vouthpixay Keomisy (Vientiane), Anne De Palacio et John Keevers (Sydney).

 

LE CLASSEMENT PAR EQUIPES

1. Hong Kong, 2067 points

2. Sydney, 1832 pts

3. Singapour, 1699pts

4. Shanghai (Chine), 1219 pts

5. Kuala Lumpur (Malaisie), 1041 pts

6. Phnom Penh (Cambodge), 731 pts

7. Canberra (Australie), 497 pts

8 Bangkok (Thaïlande), 376 pts

9. Vientiane (Laos), 184 pts

10. Hanoi, 131 pts

11. Séoul (Corée du sud), 108 pts

12. Djakarta, 51 pts

 

Partager la page