De passage aux championnats de France de nage hivernale à Samoëns (Haute-Savoie), le Directeur technique national Julien Issoulié a accepté de livrer son ressenti sur l’épidémie de coronavirus qui commence à déferler sur le monde. Avec franchise et sans détour, il nous a fait part de ses inquiétudes et de la menace réelle qui plane sur la fin de saison olympique.
Depuis plusieurs semaines, les annulations de compétitions et de rendez-vous sportifs se succèdent à une vitesse effrayante. Comment gérez-vous cette menace sanitaire ?
Ce coronavirus complique tout ! L’année olympique apporte déjà son lot de d’enjeux, de contraintes et de pression, voilà qu’à présent, il faut tenir compte de cette nouvelle donnée. Si un nageur tombe malade et qu’il contamine son équipe, qu’est-ce qu’on fait ? Pour l’instant, le ministère de la Santé a diffusé pas mal de messages de précautions et depuis quelques jours des directives que le ministère des Sports a largement repris. Un groupe WhatsApp pour les DTN a été créé. Il y a beaucoup d’inquiétudes mais il n’y a pas de raison de sombrer dans la panique. Néanmoins, vu que nous sommes en pleine saison olympique, dans le sprint final je dirais que c’est source de préoccupation.
N’y a-t-il aucun moyen de s’en préserver ?
Je ne suis pas médecin, donc je ne sais pas de quoi il retourne exactement. On me dit que c’est comme la grippe, mais bon, on s’aperçoit que ça touche le monde entier alors les répercussions semblent plus sérieuses. Le problème, c’est que ça sort complètement de mon champ de mission. Pour le moment, c’est quelque chose qui nous dépasse complètement. Ma seule crainte aujourd’hui est que des sportifs tombent malade, qu’ils soient obligés de rester confinés quinze jours, si ce n’est davantage, et qu’ils ratent la qualification olympique… Pour le moment, je n’ai aucune réponse à leur donner et il est donc important que tout le monde fasse attention et respecte les consignes de précaution.
En dépit de ce contexte, allez-vous imaginer une stratégie spécifique pour répondre à cette crise sanitaire ?
Cette épidémie va évoluer dans les prochains jours, voire mois. Nous allons donc faire des points réguliers avec les dirigeants de la fédération pour évaluer la situation et tenter de trouver les meilleures réponses…
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Est-ce que cela peut aller jusqu’à décaler les championnats de France de Chartres (14-19 avril), qualificatifs pour les Jeux olympiques de Tokyo ?
Pour le moment nous n’en sommes pas là. Néanmoins, cela fera partie des aussi des sujets à évaluer. Pour l’instant, ce n’est pas envisagé, mais si le virus se répand, il faudra peut-être reconsidérer les choses. Mais je le répète, tout cela est au conditionnel. On ne sait pas comment la situation va évoluer. Si les nageurs ne peuvent plus aller s’entraîner, qu’est-ce qu’on fait ? Pas la peine de céder à une quelconque paranoïa, mais il importe quand même de se poser les bonnes questions, celles qui vont permettre d’assurer le déroulement à peu près normal de cette saison olympique.
Est-ce que cela a déjà des conséquences sur la natation française ?
Oui, absolument ! Les groupes de Michel Chrétien et Fabrice Pellerin étaient en stage à Ténérife. Ils ont passé leur semaine à se demander comment ils allaient pouvoir rentrer ou comment éviter d’attraper ce virus plutôt que de parler d’entraînement et de se projeter sur l’objectif olympique. Le groupe de Julien Jacquier devait les rejoindre et finalement ils ont annulé. Le tournoi de qualification olympique de l’équipe de France féminine de water-polo qui devait initialement se tenir à Trieste (Italie) dans 10 jours a été décalé au mois de mai, il va donc falloir modifier les calendriers ainsi que de programmer une nouvelle préparation. Enfin l’Open de natation artistique va recevoir de nombreuses nations. Nos équipes travaillent donc pour que ce bel événement puisse se dérouler sans soucis. Voilà, pour le moment, c’est toutes les informations que je suis en mesure de vous transmettre. Je n’en sais pas davantage.
Recueilli par Adrien Cadot