A la veille de la coupe du Monde 10 km de Doha (Qatar), rencontre avec Stéphane Lecat, directeur de la discipline eau libre à la Fédération Française de Natation. Il revient avec nous sur les multiples enjeux de cette première compétition internationale eau libre de l’année 2020.
Quelles sont vos attentes pour la compétition de demain ?
Il y a différentes attentes. Il s’agira d’abord de voir où en sont nos trois nageurs qualifiés aux Jeux olympiques (David Aubry, Lara Grangeon, Marc-Antoine Olivier). Cette compétition est un point d’étape dans leur préparation. Il sera intéressant d’observer leur niveau de combativité et d’engagement, et faire le point avec eux et le staff après la course pour affiner encore leur préparation olympique. Ce qui m’importe en priorité, c’est de voir en course que ces trois nageurs ont pris conscience de la chance qu’ils ont de représenter la France aux Jeux de Tokyo et que rien ne leur fait peur.
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Il y aura également un autre enjeu : les places qualificatives pour les championnats d’Europe (Budapest, mai 2020).
Certains nageurs ont rempli les critères de pré-qualification en bassin, ils auront donc l’opportunité de se qualifier demain pour cette compétition sur 10 km et 5 km. Et nos plus jeunes nageurs pourront prendre de l’expérience en osant aller se confronter à l’élite internationale qui sera réunie au départ. Il y aura peut-être des places restantes pour intégrer l’équipe de France aux championnats d’Europe à l’issue de la coupe du Monde de Doha. Dans cette perspective, il sera intéressant d’observer le comportement en course de chacun, et notamment de nos nageurs à fort potentiel pour Paris 2024. Début mars, sur la coupe d’Europe d’Eilat (Israël), seront sélectionnés les nageurs pour le 25 km des championnats d’Europe pour accompagner Axel (Reymond) et Lisa (Pou) d’ores et déjà qualifiés sur cette distance. Une fois que la liste des nageurs ayant rempli les critères pour chaque épreuve sera établie, nous analyserons la situation et prendrons en considération l’objectif central de notre projet sportif avec le DTN : la préparation des Jeux de Paris 2024. Si cela doit passer par une dérogation à la règle pour un ou plusieurs athlètes à fort potentiel, comme cela a été le cas l’an dernier avec Axel Reymond, qui n’aurait pas été en mesure de défendre son titre mondial avec succès si nous avions suivi les critères de qualification à la lettre, alors je n’hésiterai pas à le faire. Nous aurons un œil attentif sur toutes les compétitions en bassin et en eau libre jusqu’à la sélection définitive pour Budapest. J’invite donc tous les nageurs qui ont un projet de haute performance en eau libre à se mobiliser sur les différentes compétitions.
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Sur la coupe du Monde de Doha, le staff de l’équipe de France est en configuration olympique. Pouvez-vous nous en dire plus sur son fonctionnement ?
En plus des coaches, nous sommes accompagnés par Jean-Loup Bouchard (médecin), Fabien Horth (kiné), Marion Bril (ostéopathe), Emilie Pelosse (préparation mentale), Frédéric Barale et Robin Pla (optimisation de la performance). L’objectif est d’optimiser l’ensemble de leurs champs de compétence en situation de compétition, à rendre leurs compétences individuelles de plus en plus complémentaires. L’idée est aussi qu’ils puissent tous s’accompagner les uns et les autres dans leurs tâches, en toute franchise, en toute confiance, dans le respect des valeurs de notre collectif, pour l’optimisation des performances de nos nageurs. Nous serons également en configuration olympique sur la coupe du Monde des Seychelles début mai, cette fois-ci avec des conditions climatiques et de température d’eau proches de celles des Jeux de Tokyo. Ça sera vraiment la grande répétition. Après les Seychelles, les nageurs suivront une préparation individualisée en prenant en compte les caractéristiques de chacun, sur la base des expériences positives des années précédentes : David en plaine avec Philippe Lucas, Lara et Marc-Antoine en altitude en Sierra-Nevada (Espagne) avec un important accompagnement scientifique. L’avantage cette année est que l’on connait déjà les gens et les singularités des lieux partout où l’on va aller, on saura sur qui s’appuyer si besoin, c’est un vrai atout.
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
A moins de six mois des Jeux, êtes-vous un directeur la discipline eau libre serein et optimiste ?
Ce qui me rassure, c’est que je sais que nous avons de super nageurs qualifiés pour Tokyo, même s’il nous manque Aurélie (Muller), mais c’est ainsi, malheureusement. Nos trois nageurs ont un très fort potentiel pour les Jeux. Nous avons des entraineurs et un staff très compétents. C’est la force de notre équipe. Il y a les nageurs, mais aussi l’environnement autour d’eux qui est de qualité et qui peut offrir des réponses aux différentes problématiques que nous pourrions rencontrer. C’est assez sécurisant pour un directeur. La problématique restante pour moi est qu’il faut manager tout ça. Le risque est qu’il peut très bien se passer quatre mois sans souci, et soudain, en une journée, éventuellement se poser un problème important. C’est là qu’il faut être prêt à pouvoir le régler.
Recueilli à Doha par Florian Lucas