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Sport né dans les années 70, phare en Scandinavie, en Allemagne ou encore en Colombie, ce rugby en apnée tente de s’ancrer dans l’hexagone. Le samedi 4 mars dernier, à Cannes, quarante « nageurs du dimanche » s’y sont initiés. Sans plaquage et sans passe vers l’arrière, cette découverte du vague cousin du XV les a emballés. Allez, plongeons dans ce (tout aussi) vague cousin du handball et du hockey-sur-glace. Découverte.

« C’est le souffle qui tue », expulse, en enlevant son bonnet de water-polo et son tuba, une nageuse qui n’en manque pas. Pourtant affûtée (« même si je barbote seulement 6 km par semaine pour préparer les championnats de France des maîtres de Dunkerque »), Sophie de Ronchi (31 ans) vient de participer à une initiation de rugby subaquatique. Maître-nageur au Grand Bleu (le complexe aquatique cannois), cette ès-quatre nages a mué gardienne de but pour défendre une cage fixe en forme de gros panier : « Ah, franchement, ce sport est très original ! Autant je ne pense pas qu’il faille un corps d’athlète, comme au water-polo, pour bien s’en sortir, autant accélérer et retenir son souffle met le cardio à rude épreuve. Quant à ces accélérations de palmes, ça pompe bien les muscles. Demain, courbatures en vue… Mais, je me suis bien amusée. Pendant trente ans, j’ai appris à flotter. Là, j’ai dû apprendre à couler… ».

Au fil de cette initiation, Dominique Lasseigne (57 ans), directeur du Grand Bleu, a aussi mouillé le maillot : « Comme les passes se font uniquement vers l’avant, comme nous sommes au contact pour attraper un joueur sans toucher son matériel ou lui arracher le ballon, j’ai plutôt retrouvé mes sensations de handballeur ». Cet ex-pivot en a vite cerné la clé : « Afin d’aller aider les copains, il faut arriver à revenir à la surface le plus vite possible, pour reprendre son souffle puis redescendre tout aussi vite pour repartir à l’attaque. Au départ, réussir à faire cet ascenseur n’est pas évident parce que, comme nous regardons le jeu, en ayant la tête immergée. Alors, quand on plonge aider un copain, on oublie souvent de bien prendre son souffle avant. Et ça fait mal aux oreilles…».

Sur 3 à 5 mètres de profondeur, cet ascenseur sous-marin tire sur les oreilles des deux gardiens de but faisant écran avec leur corps devant leur cage, des deux attaquants et deux défenseurs : « Au bout d’un mois, compenser n’est plus un problème », certifie Anaïs de Chaumont (25 ans), pilier des Frogs de Bordeaux, la première équipe française. Comme tous les joueurs de rugby suba, cette institutrice au maillot de bain noir et blanc aux couleurs maoris ne déboule pas du rugby : « Moi, je viens de la danse classique ! Et avant, je n’avais même jamais pratiqué un sport-co. Depuis que je l’ai découvert à Cologne (Allemagne), je l’ai adopté ! Je joue dans une équipe mixte où les femmes tirent très bien leur épingle du jeu en s’appuyant sur leurs propres qualités : une meilleure maîtrise de la compensation, de l’apnée, de la vision du jeu et du rapport avec  l’eau que les hommes. Ces équipes, parfois mixtes sont bien complémentaires. Sinon, chez nous, les joueurs entrent en jeu et en sortent comme au hockey-sur-glace ».

Sur un terrain de 15 à 20 mètres de long sur 12,5 mètres de large, le ballon est roi. Mais pas ovale ! Lesté d’eau salée, il coule ainsi doucement dès qu’il est lâché. Et, ne doit jamais sortir de l’eau. Sous l’eau, les coups ne pleuvent pas, mais guettent, comme l’explique Pascal Mora (31 ans), professeur d’EPS venu s’y initier : « En remontant à la surface pour respirer, on traverse souvent une mêlée de palmes donc, on peut alors prendre des coups : soit, ça vous casse le mollet ; soit, ça vous met le masque en travers et il prend l’eau. En remontant, il faut donc être vigilant…».

Si la France court toujours après une équipe nationale, ce sport, affilié récemment à la Fédération Française des Sports Sous-Marins, cartonne en Scandinavie, en Colombie (ayant accueilli la coupe du monde en 1995 et 2015) ou en Allemagne (ayant une soixantaine d’équipes seniors, juniors et universitaires), pourtant aucunement ancrés dans le monde de l’Ovalie. Architecte venue de Colombie, où quatre grandes villes s’en disputent la suprématie, Carolina Vargas (37 ans) construit son club à Nice avec un entraîneur allemand Torsten Stanschu (29 ans), deux joueurs français « en en espérant d’autres ». Ancienne patronne de la sélection espagnole, la responsable de Nikaia RugbySub se projette loin avec ses voisines Milan et Barcelone. Dans son sillage, le kinésithérapeute  luxembourgeois Sandro Unfer (31 ans) a pris en main une équipe à Albi : « Même si nous ne faisons pas de plaquages et de passes vers l’arrière, j’espère imposer notre jeu sur cette terre de rugby. En attendant, comme nous sommes les seuls témoins de notre sport, nous sommes aussi ses uniques photographes ».

Texte : Sophie Greuil

Photos Samuel Toumi & Sophie Greuil

 

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