Au regard de l’augmentation du nombre de noyades accidentelles en France, notamment chez les moins de 6 ans, et dans le cadre des nouvelles orientations souhaitées par Roxana Maracineanu, le ministère des Sports se mobilise pour endiguer la problématique des noyades en lançant le plan « Aisance aquatique ». Agnès Berthet, adjointe au DTN, nous présente ce dispositif ambitieux qui propose une approche rénovée du milieu aquatique dès le plus jeune âge.
On a le sentiment que le plan « Aisance aquatique » est un peu le « bébé » de la ministre des Sports Roxana Maracineanu.
C’est, en effet, l’une des raisons pour lesquelles Roxana Maracineanu a été nommée ministre des Sports. C’est sur ce sujet qu’on l’attendait après l’augmentation du nombre de noyades entre 2015 et 2018.
Dans la lettre de l’économie du sport de septembre 2019 on apprend que « la noyade est la première cause de mortalité par accident des moins de 15 ans ». Il y avait donc urgence.
La préoccupation est forte, c’est indéniable ! Attention toutefois à l’usage que l’on fait des chiffres. Il importe de les vérifier scrupuleusement. Toutefois, il est certain qu’aujourd’hui les moins de 6 ans et les plus de 65 ans sont les deux publics les plus touchés par la problématique des noyades.
Naturellement, la ministre des Sports s’est tournée vers son ancienne maison pour lancer le plan « Aisance aquatique ».
La FFN est en première ligne, mais pas seulement. Toutes les fédérations aquatiques sont impliquées mais aussi l’ensemble des acteurs présents autour des bassins, les collectivités territoriales et l’éducation nationale. Reste que la FFN pilote un groupe de travail missionné sur la conception d’un test unique sécuritaire qui va prochainement voir le jour.
Le plan « Aisance aquatique » est-il compatible avec le plan « J’apprends à nager » que chapeaute l’institution fédérale depuis 2015 ?
Rien n’oppose ces deux opérations. A mon sens, elles sont complémentaires. La seule nuance à opérer concerne le public visé. Le plan « Aisance aquatique » se focalise sur les apprentissages précoces, donc des enfants de 4 à 6 ans, tandis que le plan « J’apprends à nager » se concentre sur des jeunes de 6 à 12 ans. Tout a été pensé pour que les enfants se familiarisent le plus tôt possible avec la culture de l’eau. C’est d’ailleurs dans cette perspective qu’ont été imaginées les classes bleues qui doivent permettre à des enfants de maternelle de s’initier en toute sécurité aux plaisirs aquatiques.
Le plan « Aisance aquatique » n’a donc absolument rien d’un effet d’annonce.
C’est tout sauf un plan de communication. Derrière cette opération, il y a un véritable enjeu de société défendu par les ministères des Sports et de l’Education nationale. C’est d’ailleurs pour cette raison que la Fédération Française de Natation se retrouve en première ligne. Notre implication à tous les niveaux de la société nous permet de jouer ce rôle de relais auprès des Français.
Vous évoquez les « classes bleues ». De quoi s’agit-il exactement ?
Il s’agit d’apprentissages massés de classes de maternelles qui viennent découvrir l’eau et acquérir des compétences allant jusqu’à l’autonomie aquatique.
Que les choses soient claires, il ne s’agit pas d’apprendre à nager.
Avec le plan « Aisance aquatique » on ne parle pas de natation, mais bien d’autonomie et d’aisance. Passée la classe de maternelle, la suite est à construire pour les enfants, mais un premier pas aura été franchi en matière de culture aquatique.
Reste à régler la question des équipements. Entre les clubs, le public et les scolaires, les lignes d’eau sont pleines à craquer.
Au-delà de la problématique du manque d’équipements, il faut d’abord s’atteler à la question de la gestion de nos bassins. Cela a d’ailleurs été pris en compte dans le plan « Aisance aquatique ». La ministre a ainsi mis en place un groupe de réflexion chargé d’étudier cette question.
Il n’empêche, on manque cruellement de piscines.
Le ministère des Sports en a pleinement conscience. Une enveloppe supplémentaire a été allouée, cette année, pour soutenir le développement des équipements aquatiques. Ce n’est d’ailleurs pas tout ce qu’a changé l’arrivée de Roxana Maracineanu au ministère des Sports. Depuis sa prise de fonction, les subventions consacrées au plan « J’apprends à nager » ont doublé. De 1,5 millions d’euros, elles sont passées à 3 millions d’euros. Ce sont des gestes forts qui démontrent une vraie volonté des pouvoirs publics de faciliter l’accès à l’eau.
On a le sentiment que pour la première fois depuis des années les planètes sont alignées.
Aujourd’hui, les ministères des Sports et de l’Education nationale sont pleinement mobilisés sur la question de l’autonomie aquatique. On assiste à une véritable prise de conscience doublée d’une convergence pour régler la problématique des noyades et faciliter l’accès à l’eau.
Cette convergence peut-elle également combler le manque de culture aquatique qui affecte notre pays ?
Je crois, en effet, que cela peut nous aider à franchir un cap. Outre la présence de Roxana Maracineanu au ministère des Sports, il faut noter l’implication d’Alain Bernard dans le plan « Aisance aquatique » ainsi que l’investissement d’anciens champions comme Frédérick Bousquet, Sébastien Rouault ou Fabien Gilot en faveur de Paris 2024. Il reste beaucoup de travail pour soutenir l’éclosion d’une culture aquatique, et plus généralement sportive, mais je crois que les progrès réalisés sont d’ores et déjà notables.
Ce déficit de culture sportive n’est-il pas également à mettre en rapport avec la place que le sport occupe à l’école ?
Il importe, en effet, que le sport retrouve une place cohérente au sein des établissements scolaires. Aujourd’hui, il n’est plus possible de faire l’économie d’un apprentissage de la natation. Au-delà du plan « Aisance aquatique », il faut que la natation retrouve toute sa place dans notre société.
Concrètement, quel va être le rôle de la FFN ?
Dans un premier temps, nous avons répondu aux attentes de la ministre des Sports en inaugurant des formations à destination de personnes disposant déjà de compétences en pédagogie aquatique. Une première formation nationale se tiendra du 6 au 9 janvier 2020.
Quelles sont les ambitions de cette première campagne de formation ?
Nous souhaitons former autour de 200 personnes sur la problématique de l’aisance aquatique.
Recueilli par Adrien Cadot