Aller au contenu principal

En décrochant deux médailles de bronze aux championnats du monde de Gwangju (21-28 juillet), l’équipe de France n’a pas (encore) renoué avec son lustre d’antan. Il n’y a pas si longtemps, les Bleus empilaient les breloques comme d’autres les briques. Reste que ce groupe réduit (onze nageurs dont dix engagés dans des épreuves individuelles) a réussi à tirer son épingle d’un jeu international particulièrement relevé. Au total, les Tricolores auront pris part à huit finales et raflé deux médailles de bronze qu’ils auraient aisément pu faire fructifier si les têtes d’affiche du collectif national avaient évolué à leur meilleur niveau. Pas si simple en fin de compte. Les cadres tricolores ont connu une saison difficile, émaillée de blessures (Charlotte Bonnet), d’un déménagement (d’Amiens à Nice pour Jérémy Stravius), de doutes (Mehdy Metella) ou d’une retraite suivie d’un retour (Clément Mignon). Difficile dans ces conditions de s’exprimer dans les meilleures conditions. Mais, comme souvent, de ces « turbulences » a jailli une éclaircie. Les jeunes pousses de l’équipe de France que l’on disait tendres ont pris leurs responsabilités. Marie Wattel (double finaliste sur 50 et 100 m papillon et médaillée de bronze avec le relais mixte 4x100 m nage libre), David Aubry (médaillé de bronze sur 800 m nage libre et quatrième du 1 500 m nage libre) et Maxime Grousset (neuvième du 50 m nage libre) se sont fait un nom en Corée. Un nom qu’on aimerait entendre résonner l'année prochaine à Tokyo. Bilan de la compétition en compagnie de Richard Martinez, directeur de la natation course à la Fédération Française de Natation.

Que retenez-vous de cette semaine coréenne ?

Il s’agissait d’abord et avant tout de valider les critères de sélection mis en place cette année (Rennes, championnatsde France, 21-26 avril). A ce titre, je crois qu’on ne s’est pas trompé. Ce qui nous aura manqué, c’est l’état de forme de nos meilleurs pour se montrer plus performant. A un an des Jeux, c’est une bonne expérience. J’espère qu’ils en tireront profit pour faire une très belle saison olympique.

Les Bleus ont participé à huit finales (deux pour Marie Wattel et David Aubry). Pour onze nageurs engagés dans la compétition, c’est plutôt convaincant.

Huit finales et six finalistes pour un groupe composé de onze nageurs, oui je trouve ça satisfaisant ! Le niveau mondial est très relevé et certains podiums sont encore inaccessibles. Je retiens que nous avons vécu une belle soirée le mercredi 24 juillet avec la médaille de bronze de David Aubry sur 800 m nage libre. Cela montre qu’on n’a pas tout faux. Il faut garder confiance dans nos idées et garder le cap.

David Aubry, médaillé de bronze du 800 m nage libre (KMSP/Stéphane Kempinaire).

Comme vous le dîtes : « Le niveau mondial est très relevé ». N’est-ce pas préoccupant à l’heure où la natation française est en plein renouvellement générationnel ? En clair, ne sommes-nous pas en train de prendre du retard sur les meilleures nations mondiales ?

Avec plus de nageurs et des cadres au top de leur forme, notre bilan aurait été différent car la dynamique collective n’aurait pas été la même. Nous devons continuer à accompagner au mieux ceux qui ont un réel potentiel tout en bâtissant l’équipe de demain. Un Maxime Grousset, par exemple, n’était pas loin d’intégrer la finale du 50 m nage libre (neuvième des demi-finales). C’est vraiment intéressant pour l’avenir. De manière générale, je suis satisfait de nos championnats du monde. Je trouve que nos athlètes ont affiché un bel état d’esprit, de la combativité, de l’engagement et de l’implication.

A l’instar de Marie Wattel, double finaliste sur 50 et 100 m papillon et médaillée de bronze avec le relais mixte 4x100 m nage libre.

La réussite de Marie à Gwangju démontre qu’il faut du temps pour éclore au plus haut niveau. Au-delà de la patience, il importe également de trouver l’environnement optimal pour exprimer son potentiel. C’est d’ailleurs ce que le staff de l’équipe de France s’emploie à offrir aux nageurs tricolores.

Marie Wattel, double finaliste sur 50 et 100 m papillon et médaillée de bronze du relais 4x100 m nage libre mixte (KMSP/Stéphane Kempinaire).

Vous parliez de David Aubry précédemment. Qualifié sur le 10 km des Jeux de Tokyo et médaillé de bronze du 800 m nage libre, il est le premier nageur de l’histoire de la natation française à performer à la fois en eau libre et en bassin. Quel regard portez-vous sur sa polyvalence ?

Déjà, je pense que sa saison olympique sera plus simple à gérer. A Tokyo, les épreuves d’eau libre se disputeront après celles de natation course. Cette année, en Corée, c’était l’inverse. Sa réussite est donc d’autant plus remarquable. Après un 10 km, réussir à être performant sur 800 et 1 500 m nage libre, ce n’est pas rien ! D’autant qu’il est à chaque fois parvenu à améliorer ses records personnels. L’année prochaine, au Japon, l’enchaînement sera plus cohérent. Passer du 800 au 10 km, c’est plus logique. Quant à sa complémentarité, il faut la saluer, mais elle n’appartient qu’à lui. Certains nageurs sont capables de le faire, mais d’autres ont plutôt intérêt à se concentrer sur un objectif.

A Gwangju, Jérémy Stravius a vécu ses derniers championnats du monde.

Jérémy a eu un très beau parcours sur la scène internationale. Il a énormément contribué aux succès des relais de l’équipe de France. C’est un pilier du collectif national ! Reste qu’à un moment donné, il faut savoir préparer son départ. Jérémy a pris la décision de continuer jusqu’aux Jeux de Tokyo. Je ne doute pas un seul instant qu’il a mûri sa réflexion. Pour moi, c’est la bonne !

Jérémy Stravius a vécu ses derniers championnats du monde à Gwangju, cet été (KMSP/Stéphane Kempinaire).

D’autant que son influence au sein du collectif national n’est pas à négliger.

Il a un rôle important en termes d’expérience. Il connaît parfaitement le timing des compétitions. Il sait comment ne pas se disperser et de quelle manière rester focus sur un objectif.

Pour finir, avez-vous anticipé le retour de Florent Manaudou ?

Bien sûr ! Ça peut amener un plus à l’équipe parce qu’il a réalisé de superbes performances par le passé. Un titre de champion olympique, ce n’est pas rien (Londres 2012), comme un titre de vice-champion olympique d’ailleurs (Rio 2016). Avec sa performance réalisée au meeting de Rome en juin dernier (21’’72), il aurait eu sa place en finale des championnats du monde de Gwangju. Reste maintenant à savoir s’il aura le mental pour aller chercher les derniers centièmes. Physiquement, il a tout pour réussir. Le reste est une question de motivation.

Recueilli à Gwangju par A. C.

 

Partager la page