Vice-championne de France du 1 500 m nage libre en 16’32’’90, Aurélie Muller, triple championne du monde en eau libre, n’affichait pas sa sérénité habituelle à l’heure de se présenter devant les médias en zone mixte. Il faut dire qu’après une saison 2017-2018 consacrée à ses études de nutritionniste, la nageuse de Philippe Lucas tarde à retrouver la plénitude de ses moyens et cette hargne qui l’a fait entrer dans le gotha de la longue distance.
Aurélie, que retiens-tu de ta finale ?
Rien de particulier… De toute façon, je n’avais rien imaginé de précis.
Pourquoi ?
Parce que mes sensations ne sont pas très bonnes depuis le début des championnats. Je manque un peu d’entraînement et je savais que Lara (Grangeon) avait un niveau plus élevé que le mien sur cette période. Le but c’était donc d’essayer de l’accrocher le plus longtemps possible. A la fin, ça a été dur…
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Es-tu déçue ?
Oui, parce que j’aurais aimé faire moins de 16 minutes 30…
On a l’impression que tu cours après la forme depuis le début de saison.
C’est vrai que ça fait un moment que je ne suis pas sentie à 100%. Je veux que tout soit parfait alors je veux retrouver ma forme rapidement, mais ça tarde à revenir. Forcément, je me pose des questions. Et puis ça fait quand même deux fois que Lara (Grangeon) me bat : sur le 10 km de la coupe d’Europe à Eilat (fin mars) et ici, à Rennes, en finale du 1 500 m nage libre. Malgré tout, je suis confiante car je sais aussi que je suis moins bien et que je ne réalise pas les entraînements que je faisais il y a deux ans. Dans ce contexte, le stage du mois de juin en Sierra Nevada sera déterminant pour la suite…
Comment ça ?
Si je fais un bon stage, ça devrait bien s’enchaîner, mais dans le cas contraire, ce sera plus difficile.
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
As-tu d’une certaine manière l’impression de « payer » la saison passée que tu as axée sur tes études ?
Non, ce n’est pas ça… Disons que mon corps n’a plus l’habitude de se faire mal. Je n’ai plus la hargne des années précédentes. J’essaie de la retrouver, mais ça prend du temps. C’est aussi pour cette raison que j’ai nagé le 400 m nage libre aux championnats de France de Rennes. J’ai besoin d’enchaîner, de me faire mal… Il n’y a que comme ça que ça va « payer ».
Malgré tout, le challenge que tu t’étais fixée en début de saison est atteint : décrocher ta qualification sur le 10 km des championnats du monde.
Le challenge est relevé, mais je vise plus haut. Cet été, j’aurais un titre à défendre. Au-delà de rentrer dans le top 10 aux Mondiaux pour me qualifier aux Jeux Olympiques de Tokyo j’aimerais bien monter sur la boîte. Et là, je sais que je ne suis pas au niveau. Ça m’inquiète un peu, mais ça ne passera que par le travail. Il faut à tout prix que mon corps accepte à nouveau la douleur.
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Doit-on en déduire que tes entraînements sont moins « copieux » ?
Non, ce n’est pas ça ! Ils sont toujours aussi corsés, mais j’arrive moins à repousser la douleur et à mettre en place ce qui va me permettre de m’exprimer pleinement en compétition. Je manque aussi de puissance.
En as-tu parlé avec Philippe Lucas ?
Je pense qu’une discussion va s’imposer. Là, ça commence à me tourner dans la tête.
Que vas-tu lui dire ?
Tout simplement qu’il faut qu’on fasse quelque chose parce que si on en reste là, je ne vais jamais monter sur la boîte en Corée. Or, moi, ce que je veux, c’est me hisser sur le podium afin d’aborder l’année des Jeux dans les meilleures conditions.
Recueilli à Rennes par A. C.