Il y a un tout petit plus de deux ans, Lara Grangeon spécialiste du 4 nages prenait une décision importante. Un tournant dans sa carrière. La Calédonienne a mis le bassin de côté pour se focaliser sur l’eau libre. D’abord le 25 km, puis tout naturellement le 10 km, la course olympique. Avec un objectif en tête : représenter la France à Tokyo en eau libre. Après Londres en 2012 et Rio en 2016 avec l’équipe de France de natation, Grangeon rêvait de disputer ses troisièmes Jeux Olympiques avec les Bleus de l’eau libre. Et elle s’est donnée les moyens de ses ambitions. D’abord à Montpellier avec Philippe Lucas, puis ensuite à l’INSEP avec Xavier Idoux. Un apprentissage express couronné de deux médailles européennes en 2018 pour ses premiers Euro (deux médailles de bronze avec le relais et sur le 25 km). Jusqu’à cette quatrième place aux Mondiaux de Gwangju en ce 14 juillet. Un rang qui lui permet d’atteindre ce graal et d’être la première nageuse tricolore à décrocher son ticket pour les Jeux Olympiques de Tokyo l’été prochain.
Quel est ton premier sentiment ?
Je suis vraiment très contente. Les premiers tours se sont déroulés comme prévu puis ça s’est un peu emballé en fin de course. Je n’arrivais plus à nager mais j’étais focalisée sur le fait d’aller jusqu’au bout. À l’arrivée, il y a toute la pression qui retombe. Je suis vraiment heureuse. Ça n’a pas été facile mais je me suis accrochée à mon rêve.
Quelle était ta stratégie aujourd’hui ?
Je me suis adaptée, ce n’était pas tout à fait ma stratégie initiale. Hier le staff nous avait mis en garde sur les passages de bouées. J’ai essayé de bien me placer et d’accélérer pour passer en tête et me protéger. J’ai écouté tous les conseils du staff, qui est formidable. C’est ce qui m’a permis d’être dans les 10 aujourd’hui.
Lara Grangeon se concentre avant le départ du 10 km des championnats du monde (KMSP/Stéphane Kempinaire)
Avez-vous essayer de faire des relais en tête avec Aurélie ?
À aucun moment je n’ai voulu réaliser une course de stratégie ou prendre des relais avec Aurélie. Je me suis focalisée sur le fait de m’économiser dans les premiers tours. J’essayais d’être toujours aux avants postes pour me protéger et ne pas me prendre de coups parce que je n’arrive pas à nager dans ces conditions. Je voulais bien passer les bouées et ça a fonctionné, je suis contente.
Le dernier tour a été particulièrement tendue avec beaucoup de nageuses très proches.
Ça se nage dessus, ça se tire, ça se donne des coups, mais je savais que ça allait être comme ça. À un moment, j’ai essayé de prendre la tête parce que j’ai vu que ça se donnait des coups et je ne voulais pas donc je suis restée focalisée sur moi.
Lara Grangeon découvre le classement final à l'arrivée du 10 km. Quatrième de la course elle est qualifiée pour les prochains Jeux Olympiques de Tokyo sur la distance. (Photo: KMSP/Stéphane Kempinaire)
Comment as-tu géré l’arrivée ?
Ça a été horrible pour moi. À 300 mètres de l’arrivée, je sens qu’on est encore plus de dix. Je me suis dit que je n’avais pas fait tout ça pour rien. Je me suis bien battue et je réalise une belle touche. Mes qualités de sprinteuse m’ont bien aidée.
Quand tu as décidé de te consacrer à l’eau libre il y a deux ans, pensais-tu en être là aujourd’hui ?
J’avais envie d’y croire sinon je ne me serai jamais lancée là-dedans. Je sais que je manque d’expérience par rapport à certaines filles. Cette année, j’ai travaillé beaucoup le physique et je sais que dans l’eau je suis l’une des meilleures nageuses du circuit et ça m’a donné beaucoup de force. Ça me permet de palier à ce manque d’expérience. J’arrive à nager plus vite et à prendre les devants et c’est ce qui me permet de ne pas me faire enfermer.
Recueilli à Yeosu par J. C.