Neuvième du 10 km des Jeux olympiques de Tokyo, Lara Grangeon a connu une saison post-olympique pour le moins compliquée. Après une belle quatrième place à Abu Dhabi en décembre, la nageuse tricolore s’est blessée à l’épaule lors du 10 km qui s’est déroulé en Martinique en début d’année. Après trois mois d’arrêt, Lara Grangeon a repris l’entraînement du côté de Monaco et a décidé de participer au 25 km et au relais 4x1250 m des championnats de France d’eau libre à Canet en Roussillon (16-19 juin). Un choix payant puisque la Calédonienne a remporté les deux courses avec brio.
Comment ça va ?
Ça va mieux (sourires). Après les Jeux, j’ai eu un long moment de réflexion. Je me demandais ce que je voulais faire. J’ai finalement décidé de repartir avec l’objectif de Paris 2024. J’ai donc participé à l’étape de Coupe du monde d’Abu Dhabi en décembre 2021 et ça s’est d’ailleurs plutôt bien passé pour moi (4ème du 10 km). Cela m’avait permis d’engranger de la confiance avant le 10 km en Martinique où se jouait la qualification pour les échéances internationales de l’année. Malheureusement, j’ai pris un coup pendant la course et subi une rupture du tendon du supra-épineux (épaule droite). J’ai été arrêtée un bon moment.
Comment s’est déroulée ta convalescence ?
Je me suis entretenue. J’ai fait du vélo, de la course à pied, tout ce qui m’était possible de faire pour garder une bonne forme physique. Mais quand on ne peut pas faire ce qu’on aime, c’est toujours long et délicat. Il y a environ trois semaines, j’ai pu reprendre l’entraînement dans l’eau et je sentais que ça allait de mieux en mieux. C’est pour cette raison que j’ai souhaité m’aligner sur le 25 km des championnats de France de Canet-en-Roussillon (jeudi 16 juin 2022). C’est une course que j’affectionne, celle qui m’a permis d’entrer en équipe de France d’eau libre en 2017. C’est certes une longue course, mais avec moins de contact et d’intensité. Je savais que ça pouvait me convenir par rapport à ma forme actuelle. Je me suis bien amusée. Au début, on a fait la course avec les garçons. J’ai pris du plaisir.
KMSP/Stéphane Kempinaire
Comment ça se passe du côté de Monaco où tu t’entraines désormais ?
Ça se passe bien. Je m’entraîne avec Michel Pou. Je suis dans le groupe avec Lisa (Pou, membre de l’équipe de France d’eau libre) et aussi des garçons qui font de l’eau libre. Il y a une bonne dynamique. J’ai été blessée donc je n’ai pas pu m’entraîner avec eux pendant une longue période. En janvier, j’avais également été faire un stage à Toulouse. Pour le moment, je découvre encore leur fonctionnement mais je suis assez autonome aussi. J’adore courir et je continue à le faire. J’ai 30 ans et je pense me connaitre de mieux en mieux. C’est un atout supplémentaire.
As-tu douté ou eu l’envie de mettre un terme à ta carrière durant cette période ?
Des moments de doute, il y en a en permanence, même quand tout va bien. J’ai tout quitté pour la natation. À 15 ans, je suis arrivée en métropole et je sais pourquoi je l’ai fait. J’ai toujours voulu décrocher une médaille olympique et je n’y suis pas encore parvenue. J’ai d’abord été médaillée aux championnats de France, puis aux Euro et enfin aux Mondiaux. Il me manque cette médaille olympique et c’est ce qui m’anime. C’est difficile de tourner une page sans avoir atteint son objectif. Je ne sais pas si j’y arriverais un jour, mais Paris 2024, c’est ma dernière chance.
Lara Grangeon et Lisa Pou s'entraînent ensemble à Monaco (KMSP/Stéphane Kempinaire)
Aujourd’hui, tu as pris part au relais 4x1250 m que tu as remporté avec tes coéquipiers de Sarcelles. Était-ce important de prendre part à cette épreuve en équipe ?
Durant ma blessure, ce n’était pas tous les jours facile, mais j’ai été énormément soutenue. Aujourd’hui (18 juin), j’ai participé au relais avec mes coéquipiers de Sarcelles et je leur doit beaucoup. Ils ne m’ont jamais lâchée. Guy (Canzano), le président de Sarcelles prenait régulièrement de mes nouvelles. C’est vraiment cet esprit de club qui m’a fait du bien. Pendant mon 25 km, sur le ponton il y avait aussi Fred Barale qui est toujours à mes côtés, sans oublier ma famille. Ils m’ont aidée à ne pas lâcher.
Finalement, dans cette olympiade raccourcie, cette blessure est tombée au moins mauvais moment.
Il n’y a pas de bonne année pour être blessée. Mais là j’ai eu ma coupure et je débute ma saison. Je vais peut-être pouvoir rattraper mon retard sur les autres filles qui vont s’arrêter cet été. J’ai été très bien prise en charge pour ma blessure. Je ne veux pas précipiter les choses. Je vais aussi effectuer mon retour en bassin à l’occasion des Jeux Méditerranéens à Oran (fin juin) où je vais nager le 200 m papillon et le 400 m 4 nages. On verra bien ce que ça donne mais ça me fait plaisir de représenter mon pays.
KMSP/Stéphane Kempinaire
Pendant le 25 km, as-tu ressenti des douleurs à l’épaule ?
Comme un 25 km. Aujourd’hui j’avais des courbatures mais ce sont des douleurs liées à la fatigue et non à la blessure. Je n’ai jamais abandonné une seule course mais je n’aurais pas pris de risque et si j’avais eu des douleurs ou que j’avais senti que je me mettais en danger, j’aurais abandonné.
Comment t’es-tu préparée pour cette compétition ?
Mardi dernier, j’ai décidé de m’inscrire sur le 25 km. Le lendemain j’ai donc fait un 10x1500 m. J’ai pu compter sur des super partenaires d’entraînement qui tournait tous les 400 m donc je nageais dans les pieds. J’ai fait ça avec des ravitaillements pour voir si j’étais capable de tenir un 25 km.
Lara Grangeon à l'arrivée du 25 km lors de sa première sélection en équipe de France d'eau libre en 2017 (KMSP/Stéphane Kempinaire)
Avais-tu peur de ne pas tenir la distance ?
Si je ne m’étais pas du tout entretenue je ne me serais pas inscrite. Je savais que physiquement j’avais les capacité de le faire. Je ne prendrais pas le départ du 5 et du 10 km parce qu’il y a beaucoup de filles et qu’il risque d’y avoir des contacts. Tout s’est arrêté brutalement et j’appréhende encore un peu de retrouver ces circonstances de course. Il faudra que je le fasse parce qu’il y a la coupe du monde de Paris le 10 juillet et j’aimerais bien y participer. Je partirai au contact très prochainement.
Comment va s’organiser ton été ?
Je n’ai pas prévu de couper cet été. J’ai demandé de participer à Paris, ensuite il y a une étape de l’EDF Aqua Challenge à Vichy, ensuite il y a l’Open d’été, puis Annecy, pourquoi pas une étape de coupe du monde au Canada. Je veux être au contact de mes concurrentes le plus vite possible. Pour moi, c’est un début de saison.
Recueilli à Canet par J. C.