Dès le XVIIIème siècle, les bains de rivière sont pris d’assaut par les citadins. Des philosophes comme Voltaire, Rousseau ou encore Diderot, dont l’influence est grande à cette époque, incitent à un retour à l'état naturel. Tous les étés, la population découvre le plaisir de l’eau, des bains et des lavages réguliers. Un véritable engouement commence à naître. A la suite de ce succès, beaucoup de municipalités se sont vues dans l’obligation d’instaurer des règles de baignade. Nous sommes aux alentours de 1790 et les noyades sont malheureusement courantes. Certaines rives sont donc interdites et des poteaux signalant les zones dangereuses sont mis en place. Il est intéressant de noter qu’à cette époque, la bienséance est de mise. Hommes et femmes ne s’immergent pas ensemble, même en milieu naturel. Entre temps, le premier site dédié à la baignade voit le jour. Nous sommes en 1780 et Barthélémy Turquin ouvre sur le petit bras du fleuve parisien un établissement de bains sur pilotis. Turquin en inaugurera ensuite un second au quai d’Orsay comprenant un restaurant et des salons privés. La natation tend à se démocratiser.
Aux Bains Deligny, croquis été, publié dans Le Charivari le 9 juillet 1858 (The Elisha Whittelsey Collection).
Le début du XIXème siècle sonne comme les prémices d’une nouvelle pratique de la natation. La première « école royale de natation », créée par Gérard Deligny, voit le jour à Paris en 1802. De cette école va en découler beaucoup d’autres, dans lesquelles la technique sera appréciée et les meilleurs nageurs applaudis. Malgré les obstacles rencontrés auprès de l’inspecteur de la navigation de Paris, Gérard Deligny arrive à imposer la mixité dans la pratique de la baignade et de l’apprentissage des nages, le classement élite des meilleurs nageurs parisiens ou encore la fameuse « Pleine eau », épreuve de demi-fond qui consiste à traverser Paris en nageant dans la Seine. La natation rentre peu à peu dans les mœurs, jusqu’en 1873 où le premier club de natation de France, la Société des Nageurs du Havre, est créé. L’engouement pour la discipline va s’amplifier avec l’organisation de plusieurs concours tels que ceux de l'Association des Sociétés Gymniques de la Seine, de la Société des Patriotes à Lille ou encore le concours d'Asnières.
1884 est une année capitale dans les débuts de la natation en France car elle concorde avec l’ouverture de la première piscine d’hiver du pays. Cette dernière, appelée la piscine du « Château-Landon », va devenir le véritable laboratoire expérimental de la natation sportive en France. Elle est à la disposition des femmes une fois par semaine et dès le 10 février 1885 des concours y sont organisés. La natation continue son aventure dans l’hexagone avec la première compétition officielle du pays : le critérium international de Paris en 1898 auquel participent 62 nageurs tricolores. Enfin, les Jeux olympiques de 1900 organisés à Paris vont véritablement permettre à la discipline de se faire connaître auprès d’une large audience. Il faut savoir que lors des Jeux de Paris de 1900, ainsi qu’à ceux de 1896 à Athènes, ce ne sont pas des sélections nationales mais des clubs qui concourent. Les épreuves de natation sont organisées sur la Seine entre Courbevoie et le pont d'Asnières-sur-Seine. La France y décroche six médailles dont une en or remportée par Charles Devendeville des Tritons Lillois sur une épreuve éphémère, les 60 mètres sous l’eau.
Issam Lachehab