Quatrième des championnats du monde (88,3558 points), mardi soir (21 juin), à l'issue de la finale équipe technique remportée par la Chine, la France a créé, par cette performance historique, une petite sensation dans la Szechy Pool de Budapest.
Des cris, de l'émotion, une euphorie évidente. « Nous avons beaucoup pleuré après être sorties de l'estrade », confirme en riant Charlotte Tremble. « Nous étions très contentes et c'était aussi un soulagement. La pression est un peu redescendue. On n'arrêtait pas de dire “p... !” Il ne faudra pas le retranscrire, hein ! Mais mince, on est quatrièmes mondiales, on n'y croit pas ! » La performance est forte, l'excitation toujours présente, une nuit après. Les nageuses françaises ont terminé quatrièmes de la finale équipe technique des championnats du monde, mardi soir à la Szechy Pool de Budapest. « Dès qu'on sort de l'eau, on regarde les retours des coaches (Julie Fabre et Laure Obry, au bord du bassin) pour voir comment ça s'est passé, parce que nos repères dans l'eau ne sont pas forcément les mêmes que ce qui peut ressortir. Elles nous ont directement dit que ce qu'on avait “envoyé” était bien. Nous étions donc contentes. Nous étions stressées et excitées quant au résultat, parce que cette quatrième place, on la voulait. On voulait des points. On voulait vraiment de bonnes notes. Quand on a vu le 4 et le 88, l'explosion de joie... pfou ! C'était incroyable ! », ajoute la sœur jumelle de Laura, présente en tribune avec toute la famille Tremble.
(Photo : Deepbluemedia)
« Le 88 est notre meilleure note en équipe technique », détaille-t-elle. « Les notes, on en parle tous les jours, dans notre quotidien, pour nous aider, pour nous motiver, pour aller performer. On se fixe des objectifs de note sur les éléments, l'exécution, un peu tout », liste-t-elle. « Leur objectif, c'est déjà de se battre contre leur performance personnelle, d'avoir de meilleures notes d'année en année. C'est le cas », constate à l'unisson Virginie Dedieu, qui a observé avec gourmandise la prestation de ses compatriotes depuis la tribune. « Il y a eu des 9.0, qu'on ne voit pas dans la totalité. Ce n'est pas une note de 90, mais ça se rapproche. C'est ce qui était important. Pour moi, elles pourraient même être encore plus proches des Italiennes (troisièmes avec 91,0191) sur certains éléments. La façon de nager était vraiment très propre, bien exécutée. Le 9.0 se mérite, en moyenne, je trouve. »
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Le score est une chose, la hiérarchie une autre. Les Russes bannies, les Ukrainiennes forfait, les Espagnoles absentes, la quatrième place peut être relativisée, elle n'en est pas moins frappante. « C'est un résultat qu'on n'a pas pu aller chercher depuis très, très longtemps aux championnats du monde (jamais, en fait, hormis une quatrième place à Perth, en 1998, sur une épreuve unique) », jauge Charlotte Tremble. « Tout le monde n'est pas présent, mais ça n'enlève pas tout le travail consenti dans l'année. Nous avons battu des concurrentes que nous n'avions pas battues depuis un moment, notamment les Grecques, et les points sont importants : quand on voit de bonnes notes, ça nous rassure dans notre travail. Quand on sait qu'on a livré une bonne performance et qu'on ne voit pas forcément les notes auxquelles nous pensons, c'est toujours frustrant. Là, on se dit que ça change, c'est bien ! », apprécie la nageuse.
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« J'ai senti des filles très conquérantes », témoigne Virginie Dedieu à propos d'Ambre Esnault, Laura Gonzalez, Mayssa Guermoud, Oriane Jaillardon, Maureen Jenkins, Romane Lunel, Eve Planeix et Charlotte Tremble. « Qui ont vraiment évolué depuis deux, trois années. Qui font très fort du début à la fin. Je trouve qu'il y a une grosse amélioration dans la condition physique. Les filles sont plus précises, plus hautes, plus performantes. C'est l'un des meilleurs ballets que j'aie vus dans cette finale-là. La chorégraphie est vraiment intéressante. On se régale du début à la fin. Elles ont montré une pertinence technique. C'était vraiment agréable. Elles étaient présentes, elles donnaient. Elles ne nagent pas pour elles. » La preuve : elles ont mis « les larmes aux yeux dès qu'elles sont arrivées sur la plage » à Laura Tremble, en tribune, qui était en communication téléphonique avec toutes les autres filles, en France, qui n'étaient pas du voyage. « Beaucoup d'émotion », conclut-elle, résumant plutôt bien le ressenti général.
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Pourtant, ce matin, il n’est plus temps de repenser à cette performance : il fallait enchaîner pour le libre. « J'essaie de vite faire le “switch” parce que l'équipe technique et l'équipe libre, ce n'est pas du tout la même manière de nager, pas du tout la même épreuve », explique Charlotte. « Le tout en gardant la confiance qu'on a pu gagner hier, l'excitation, la fierté qu'on a pu ressentir, pour dégager un truc encore plus “waouh” ». Sur tous les plans, Ambre Esnault confirme. « Dès l'arrivée dans nos chambres, hier soir, j'ai “switché” direct. Mais quand j'y repense, je suis vraiment très fière de l'équipe. Cette compétition, on l'attendait. Plusieurs autres nous sont passées sous le nez, notamment à cause de la pandémie. Mais là, nous avions tout pour réussir. Tout le travail de l'année paie enfin. Les points sortent aussi. On bat nos concurrentes directes. Déjà que le résultat est bon, alors en plus, quand on nous dit que le ballet est réussi, c'est encore plus satisfaisant. » Peut-être parce que les filles, de fait, commencent à bien se connaître. « C'est une équipe qui roule », constate Ambre. « On se connaît toutes quasiment par cœur, on connaît les réactions de chacune, on sait comment ça se passe en compétition... C'est vraiment devenu un rituel, et on avance très vite. » Avec, aussi, des émotions décuplées par la dynamique de groupe. « C'est multiplié par dix, douze, entre les coaches et nous. Réussir tous ensemble, c'est magnifique. » On en redemande !
A Budapest, David Lortholary