Trois nageuses et trois nageurs composent une équipe de France visant une récolte supérieure à celle de Londres (deux médailles d’or, trois en argent et trois en bronze). En son sein, un nouveau « poisson torpille » nommé Théo Curin (16 ans). Présentation
Demain, dans l’Olympic Aquatics Stadium de Barra, David Smétanine (42 ans, photo 1) plongera pour ses quatrièmes Jeux Olympiques. A la veille du début de la compétition, l’élève de Guy La Rocca, l’entraîneur de Jordan Pothain, est impatient : « Nager dans cette piscine entourée de tribunes presque rondes, comme une arène, permettant de bien ressentir le public est quelque chose d’extraordinaire. J’espère qu’il viendra nombreux et qu’il nous donnera, à tous, des ailes. » A Rio, le Grenoblois, tétraplégique, engagé du 50 au 200 m nage libre, sera l’un des six nageurs français engagés, « composant une équipe déterminée oscillant entre une élite d’experts ou de barracudas ».
Entraîneur de nageurs valides à Antibes, Régis Gautier, guide aussi Elodie Lorandi (photo 2), la tenante du titre sur 400 m nage libre. Il met en avant « la détermination de ces nageurs handicapés bien supérieure à celles des valides, moteur premier de leur réussite ».
Emmenée par son directeur Jean-Michel Westelynck (57 ans) aux sept participations paralympiques, cette petite équipe, resserrée par les quotas paralympiques de plus en plus stricts, est un concentré de talents. «Elodie Lorandi (Antibes), c’est la tornade blanche emportant tout sur son passage ! Anita Fatis (Thionville), c’est « Madame toujours plus » ! Anaëlle Roulet (La Roche-sur-Yon, photo 3), c’est « Madame doucement mais sûrement » ! David est en marche pour signer son retour des abysses après ses problèmes de santé. Charles Rozoy (Alliance Dijon Natation), c’est vraiment Némo, à qui il aime se comparer ! Enfin, il y a Théo Curin (Handisport Lunéville), qui incarne la nouvelle vague et qui est notre poisson torpille ! »
OUVRIR DES PÔLES
Forte de toutes ses personnalités « toutes très impliquées dans leurs entraînements, dédiées à leur sport, et ayant fait beaucoup d’effort pour obtenir leur ticket pour Rio », Jean-Michel Westelynck sait que son équipe est prête « à affronter l’adversité de plus en plus aiguisée dans l’élite européenne, de plus en plus resserrée au niveau mondial ». Au fil de ces dernières saisons, une pluie de records du monde et d’Europe a confirmé cet état de fait. Résultat, pour faire face à cette montée en puissance sur toutes les distances, « la France ne doit plus se contenter d’avoir un seul pôle d’entraînement à Vichy (Allier). Mais, en ouvrir quatre ou cinq au plus vite, préconise cet Alsacien ancré à Valence. Pour préparer nos espoirs de 17-20 ans pour les Jeux de Tokyo en 2020, c’est maintenant ».
Derrière David Smétanine, champion paralympique sur 50 et 100 m nage libre en 2008, et Charles Rozoy (photo 4), champion paralympique sur 100 m papillon en 2012, fuse déjà un grand espoir nommé Théo Curin (16 ans, photo 5), vice-champion d’Europe en 2016 et quatrième aux championnats du monde en 2015 sur 200 m nage libre.
ATTAQUE PAR UN REQUIN FANTOME
Benjamin de l’équipe de France paralympique, le lycéen lorrain, s’entraînant à Vichy « quatre heures par jour », est venu à la natation pour suivre l’exemple de Philippe Croizon. Comme lui, il est amputé des quatre membres. Et, comme la grande majorité des athlètes de l’élite handisport, il se croque avec humour. « A l’âge de six ans, une bactérie foudroyante m’a privé de mes mains, avant-bras, pieds et la moitié de mes jambes. Mais je dis plutôt à mes amis ou à mes camarades du lycée que je me suis fait attaquer par un requin ! Ça permet de dédramatiser ! »
Une fois son petit effet réussi, ce beau gosse reprend sa ligne, celle de rebondir en permanence. « Quand j’étais petit, j’avais peur de l’eau ! Aujourd’hui, je m’y sens libre et aucunement handicapé ! Après avoir traversé des moments difficiles, je me suis dit que cette bactérie m’avait offert comme une nouvelle chance, une nouvelle vie. Maintenant, j’ai la rage de bien faire. » Un autre point commun avec les cinq barracudas qui l’accompagnent à Rio !
A Paris, Sophie Greuil
Le programme des Bleus à Rio :
- Théo Curin (cat : S5) : 50, 100, 200 m nage libre et 50 m papillon.
- Anita Fatis (cat : S5) : 50, 100, 200 m nage libre et 50 m dos.
- Elodie Lorandi (cat : S10) : 50, 100 et 400 m nage libre.
- Anaëlle Roulet (cat : S10) : 50, 100, 400 m nage libre et 100 m dos.
- Charles Rozoy (cat : S8) : 50 m nage libre, 100 m brasse et 100 m papillon.
- David Smétanine (cat : S4) : 50, 100 et 200 m nage libre.
(*) Les nageurs sont répartis en quatorze classes. A Rio, 620 nageurs sont engagés pour 152 podiums.