Au-delà de la défaite de l’équipe de France féminine de water-polo face aux Italiennes (5-16), le mardi 28 mars à Montreuil, le sélectionneur Florian Bruzzo voulait retenir l’engagement et l’investissement de ses joueuses.
Un mot sur le match ?
C’est une rencontre qui a été très compliquée pour nous. En dépit de l’écart au tableau d’affichage, il y a des motifs de satisfaction. Au niveau du jeu et alors que nous avons eu peu de temps pour travailler, je trouve que les filles ont bien réagi aux consignes. C’est très encourageant !
Louise Guillet (capitaine de l’équipe de France, ndlr) s’est dite satisfaite de l’engagement de ses partenaires. Quel est ton avis ?
Depuis mon arrivée aux commandes de l’équipe de France (septembre 2016), je mets l’accent sur le combat. Avant la technique et la tactique, je pense qu’elles doivent être des athlètes engagées. Nous sommes dans un sport d’opposition avec beaucoup de duels et si on ne dispose pas de cette athlétisation on ne pourra pas exister. C’est le message que je leur ai fait passer et j’ai l’impression qu’elles commencent à comprendre ce vers quoi je veux tendre.
Quelles consignes as-tu donné aux joueuses avant la rencontre ?
Je ne leur ai parlé que du jeu et absolument pas du contexte et de la qualité de leur adversaire (les Italiennes vice-championnes olympiques, ndlr). Je m’en suis tenu à ce que je leur répète depuis six mois.
C’est-à-dire ?
Depuis que j’ai pris les commandes de la sélection, je leur dis de travailler, de travailler et de travailler encore. Dès qu’elles peuvent s’entraîner un peu plus de leur côté, elles doivent le faire. Si individuellement elles arrivent un peu plus forte au moment des regroupements nationaux, cela sera bénéfique pour l’ensemble de l’équipe. C’est le seul message que je leur délivre depuis six mois parce que je considère que l’exigence est la seule ligne de conduite à suivre au quotidien. L’équipe nationale, ce n’est que 100 jours par an. Les 265 autres, elles doivent s’organiser pour progresser.
Est-ce que ton message passe auprès des joueuses ?
Nous avons eu sept jours en novembre, quinze jours en janvier, quatre jours en février et quatre jours en mars. Ce n’est pas grand-chose d’autant que nous n’avons jamais eu l’effectif au complet. La difficulté de cette équipe, c’est également qu’elle s’est classé septième aux championnats d’Europe avec un matelas de trois ou quatre buts d’écart sur le huitième, mais aussi un déficit de huit ou neuf buts face aux formations du dessus. Ce groupe a du mal à trouver une opposition de son niveau. Pour l’heure, on s’attache à trouver des progrès dans le jeu. Je ne leur parle que de ça. Il existe aussi des critères objectifs sur les performances dans l’eau, hors de l’eau et en musculation. On ne se concentre que sur le jeu et forcément les scores ne peuvent pas refléter le travail, parce que perdre 20 à 4 ou 16 à 5, c’est la même chose. Mais j’affirme qu’on progresse et qu’on avance. Pas assez vite à mon goût, comme pour tous les entraîneurs, mais nous avançons.
Les Françaises sont-elles à la hauteur de tes attentes ?
J’estime que le niveau d’exigence que j’ai avec elles, c’est l’ABC du water-polo de haut niveau. On ne peut pas être en-dessous de ce que je demande. Nous avons mis en place un système de préparation physique individualisée pour celles qui souhaitent arriver aux stages dans les meilleures conditions. Il faut qu’elles soient prêtes et ce sera dur, mais plus elles seront en forme en arrivant et mieux elles le vivront.
Comment vas-tu aborder les Mondiaux de Budapest ?
Tout dépendra de nos six semaines de préparation en juin. Si elles sont capables de tenir une cadence d’entraînement et d’exigence sur toutes les dimensions de la performance, alors je serais capable de me projeter sur la suite et sur nos objectifs.
N’est-ce pas une manière de libérer ton groupe d’une certaine pression ?
Mais quelle pression peut-on se mettre ? J’ai connu ça, l’année dernière, avec les garçons parce qu’ils étaient professionnels et avaient investi toute leur vie dans le water-polo. Ce n’est pas le cas avec les filles. Elles s’entraînent quatre, cinq ou six fois par semaine pour les meilleures. Elles doivent être conscientes des efforts à fournir pour atteindre le très haut niveau. Si elles veulent disputer les Jeux Olympiques, il y a tout un ensemble de paramètres à respecter.
Louise nous a confié que lorsque tu es arrivé à la tête de la sélection, les filles étaient persuadées que tu pourrais les conduire jusqu’à Tokyo. C’est flatteur ?
Pour être honnête, je trouve cela plutôt inquiétant !
« Inquiétant » ?
Qu’elles aient confiance en moi, c’est une excellente chose, mais je suis entraîneur d’une équipe nationale 100 jours par an. Je peux optimiser leur niveau de base, mais je ne peux pas le créer puisque je ne les ai pas au quotidien. Elles attendent toujours qu’on les aide, mais c’est à elles d’investir leur projet. Meilleures elles sont et meilleure l’équipe de France sera, peu importe le sélectionneur en place !
Si les filles investissent leur projet, peut-on rêver d’une qualification olympique à Tokyo ?
Pourquoi pas ? Pourquoi on n’y arriverait pas ? On n’est pas plus stupides que les autres.
Est-ce un objectif avoué ?
Si on se dit sportif de haut niveau, on se doit de viser les meilleures compétitions. Le top, c’est les Jeux Olympiques, fin de l’histoire.
Recueilli par A. C.