Si on connait bien les jumelles Charlotte et Laura Tremble, deux autres soeurs évoluent ensemble au sein de l'équipe de France de natation artistique: Inesse (22 ans) et Mayssa (18 ans) Guermoud. Si vous avez la chance de les croiser vous assisterez soit à des éclats de rire ou des chamailleries en tout genre. Ces natives d’Aix-en-Provence ont très vite brillé et se sont retrouvées au plus haut niveau à l’Insep. Nous les avons rencontrées.
Est-ce que votre histoire avec la natation artistique a débuté de la même manière pour toutes les deux ?
Inesse Guermoud: Étant originaire d'Aix-en-Provence, j'ai débuté la natation artistique là-bas à l'âge de 6 ans. J’ai découvert la discipline en accompagnant ma maman à son cours d’aquagym qui se déroulait en même temps qu’un entrainement et j’ai adoré ça. Le club étant un pôle, j'ai très vite accéder au haut niveau. Dès mes 13 ans j'ai intégrer les équipes de France jeunes.
Mayssa Guermoud: Contrairement à Inesse, j'ai débuté mon parcours sportif par la gymnastique et j’ai pratiqué en parallèle la synchro à 6 ans. Très tôt on m’a dit que compte tenu de mon gabarit, je n’aurai pas un grand avenir en gymnastique. J'ai décidé de me consacrer entièrement à la natation artistique à l'âge de 8 ans. J’ai évidemment découvert la discipline grâce à ma sœur et la voir nager m’a donné envie de suivre ses traces.
Comment avez-vous abordé le fait de vous engager sur la même voie ?
M. G. : J'avais forcément envie de suivre son exemple parce qu'elle obtenait de très bons résultats et elle intégrait les équipes de France. Mais j'ai pu également m'aperçevoir à quel point la route était longue et difficile pour atteindre le haut niveau.
I. G. : Pour être honnête, au départ je lui ai dit "dégage de là”. Non pas parce que je ne voulais pas d’elle mais plutôt pour la protéger. Je savais ce qui l'attendait si elle voulait entrer au pôle et j’avais peur qu’en passant par tout ça elle souffre trop. J’ai ensuite compris que c'était naturel de suivre l’exemple des aînées. Notre petite sœur Shirine est elle aussi récemment entrée au pôle ! Ça devient une affaire de famille.
Mayssa et Inesse Guermoud (D. R.)
Quelle relation entretenez-vous depuis toute petite ? Est-ce que la synchro vous a rapprochées ?
I. G; : Nous étions déjà très proches et cela n'a pas changé grand chose. Nous avons tout de même quatre ans d'écart et nous n'étions pas dans les mêmes groupes. On se croisait rarement au bord du bassin. J'ai toujours été très protectrice avec Mayssa, et ce depuis sa naissance.
M. G. : On a toujours été très complices et moi je voulais naturellement suivre son exemple.
I. G. : J'étais ton idole quoi ! (rires)
M. G. : Pas du tout ! (rires)
Cette année c’est la première fois que vous nagez dans la même équipe, était-ce l'un de vos rêves ?
I. G. : Je ne m'étais jamais imaginé nager avec elle. Dans ma tête, comme en club, nous allions nous croiser en équipe de France sénior. Plus jeunes, c'était difficile de se projeter avec la différence de niveau que nous avions.
M. G. : Je suis d’accord avec elle sauf que lors de mon arrivée à l'INSEP, j'ai commencé à envisager de nager avec elle et de participer aux Jeux olympiques. Mais je pensais davantage à Paris 2024 et Inesse à Tokyo 2020.
Les trois soeurs Germoud pratiquent la natation artistique. (D. R.)
Est-ce une force d’être ensemble aujourd'hui ?
M. G.: Oui bien sûr et c’est aussi un précieux soutien. Elle m’aide beaucoup et comme je vis des choses qu’elle a déjà vécues, elle me conseille beaucoup.
I. G. : Et puis je l’emmène faire ses courses (rires). Plus sérieusement c’est une force d’avoir sa sœur qui vit la même chose, les mêmes journées que toi. Même si nous avons de très bonnes amies ça reste très différent du soutien que j’ai auprès de Mayssa.
Arrivez-vous à suffisamment séparer la famille et le sport ?
M. G. : Contrairement à ce qu’on pourrait penser, on ne passe pas tout notre temps ensemble.
I. G. : Oui c’est vrai qu'à l’Insep comme chez nous on a notre sphère privée et nos propres amis. Et puis il faut reconnaître que même si nous nous entendons très bien, le ton monte assez souvent. Mais ça ne dure jamais bien longtemps.
D. R.
Comment vivez-vous les réussites et les échecs de l’autre ?
I. G. : Nous sommes souvent plus contentes pour l’autre que pour nous-même.
M. G. : C’est exactement ce que je ressens. Par exemple, à la sélection de janvier 2020, quand j’ai été sélectionnée sans Inesse j’ai demandé à lui laisser ma place. J’ai vraiment très mal vécu cette période, j’avais perdu mon pilier dans l’équipe et je ne me sentais pas légitime.
I. G. : De mon coté, j'étais à la fois très déçue pour moi mais aussi très fière d’elle. Il n’y avait pas d’injustice mais c’est sûr que cet événement a bouleversé l’ordre des choses et c'était déroutant. Je pense qu’elle l’a plus mal vécu que moi.
Pouvez-vous donner une qualité et un défaut de l’autre et la chose que vous aimeriez prendre chez elle ?
I. G. : Est-on vraiment obligé de faire ça ? (rires)
M. G. : On peut commencer par les défauts ?
I. G. : Mayssa est très susceptible.
M. G.: Et Inesse est trop impulsive.
I. G. : Je dirais que sa qualité serait d’avoir une sorte d’innocence, elle est “pure”.
M. G.: Franchement je ne sais vraiment pas… (rires). Elle est très bienveillante. Et j’aimerais bien avoir son courage et sa détermination.
I. G. : Moi je prendrais d’elle ses jambes (rires). Et plus sérieusement sa fraîcheur !
Recueilli par Solène Lusseau