Alors bien sûr, elle n’a pas satisfait au critère de sélection du 50 m nage libre (son épreuve de prédilection) pour les championnats du monde de Gwangju (Corée du Sud), cet été. Reste que l’enjeu était ailleurs. Pour Anna Santamans, il s’agissait d’abord et avant tout de renaître à la compétition après une interruption de vingt mois pour soigner une épaule douloureuse. En signant le deuxième meilleur temps des séries en 25’’25 (derrière Charlotte Bonnet, 25’’02), la Marseillaise a non seulement confirmé son retour au plus haut niveau, mais elle a surtout démontré qu’elle n’avait rien perdu de son talent et plus encore de son envie de performer au plus haut niveau.
Anna, qu’est-ce que ça fait de retrouver les championnats de France ?
Ça fait plaisir, très plaisir ! En fait, j’ai l’impression de ne jamais être partie, d’avoir simplement mis ma carrière en pause. Je figure à nouveau parmi le gratin de la natation tricolore, c’est vraiment agréable (sourire)…
Quels sont tes objectifs à Rennes ?
Avant le FFN Golden Tour de Marseille, fin mars, je ne savais pas si j’allais participer aux championnats de France. Finalement, j’ai plutôt bien nagé à Marseille, donc des idées ont commencé à germer. Je savais que le temps de qualification (24’’9) serait difficile à aller chercher, mais j’ai décidé de tenter ma chance. Ça n’a pas fonctionné, mais ça n’enlève en rien le plaisir que j’ai de nager à Rennes.
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Qu’en est-il de tes sensations ?
Il me manque de la force. On m’a dit que j’avais fondu, mais en novembre dernier, je ne ressemblais plus à une nageuse. Là, ça commence à revenir. En musculation, il me reste encore des progrès à faire. Je ne suis pas encore à mon niveau d’avant blessure. Ça fait plaisir de rechercher des sensations, des exercices qui peuvent m’aider à retrouver mon niveau. En fait, c’est un peu comme une seconde carrière (sourire)…
Tu parles de plaisir, mais n’y-a-t-il pas eu un peu d’appréhension au moment de prendre le départ de ton 50 m nage libre, ce matin ?
Pas du tout ! Je pensais être stressée pour ma première compétition, mais j’ai tellement attendu ce moment : sentir l’adrénaline avant la course en chambre d’appel, afficher un visage de tueuse, monter sur le plot et tout donner sur 50 mètres… J’en ai rêvé pendant ces deux dernières années. Donc non, aucune appréhension, juste du plaisir !
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Ton approche de la natation a-t-elle changé ?
Je me suis rendue compte que j’adorais ce sport… Même quand j’ai été contraint de nager lentement, souple, je prenais du plaisir, j’avais envie de nager, de glisser, de sentir l’eau envelopper mon corps. Le premier jour où j’ai pu à nouveau sprinter, ça a été l’extase. Pour tout dire, je me suis même surprise à sourire dans l’eau… La folie, quoi !
As-tu suivi le retour de Théo Buissière hier (mardi 16 avril) avec lequel tu étais en convalescence cet automne ?
Oui, j’avais même l’impression de faire la course avec lui. Je l’ai regardé avec beaucoup d’attention parce que nous avons vécu un peu la même chose. On a été pudique sur notre situation, mais j’ai parfois eu l’impression qu’on n’avait pas besoin de parler pour se comprendre. Je suis vraiment heureuse de reprendre avec lui.
(KMSP/Stéphane Kempinaire)
Théo devrait disputer les Universiades cet été. Qu’en est-il de ton côté ?
J’aurais aimé, mais les critères ont changé. Maintenant, je suis vieille (sourire)… Du coup, je vais essayer de nager avec les A’. De toute façon, on trouvera toujours une compétition à disputer cet été. Nous allons en discuter les prochains jours avec mon entraîneur (Julien Jacquier).
Qu’en est-il de la douleur ? A-t-elle complètement disparu ?
Parfois, j’éprouve une sensation de gêne, notamment quand je suis fatiguée, mais je crois que je m’en sors vraiment bien.
Est-ce que l’opération et la convalescence qui a suivi ont eu un impact sur ta technique de nage ?
Mon épaule est plus raide. Je n’ai pas récupéré toute ma mobilité. Les kinés me disent que cela reste tout de même très satisfaisant. Apparemment, j’ai de la chance de pouvoir retrouver ce niveau de performance. Va falloir que j’en profite (sourire)…
Recueilli à Rennes par A. C.
(KMSP/Stéphane Kempinaire).
L’œil du coach : Julien Jacquier
« On est heureux d’avoir retrouvé Théo et Anna en plus de Clément (Mignon) parce que ce sont des personnalités qui peuvent apporter énormément au groupe. Après une si longue blessure, on sait qu’il y a des risques de rechute dans les semaines qui suivent la reprise de l’entraînement. C’était ma crainte. On y a été très progressivement, mais tout s’est bien passé. Aujourd’hui, ils sont malgré tout sur un volume d’entraînement plus faible que par le passé. Il va leur manquer un peu de réserve. Je suis très heureux de les voir revenir avec de nombreux paramètres techniques et physiologiques au niveau d’avant leur blessure. Ils arrivent avec un bagage intéressant, mais il va falloir quelques semaines voire quelques mois pour les voir revenir à leur meilleur niveau. Théo a des qualités de leader, Clément a apporté sa folie et Anna est revenue avec un niveau technique très impressionnant qu’elle transmet à Mélanie, Anouchka (Martin) ou Léna (Bousquin). Ces trois nageurs comptent pour le groupe et leur retour a fait du bien. »
Recueilli par J. C.