C’est avec le regard hagard et la voix basse que Yannick Agnel s’est présenté devant les médias à l’issue de son 200 m nage libre (19ème en 1’47’’35). Le champion olympique en titre était extrêmement déçu, mais fier d’avoir pu défendre son titre. Entretien.
Que ressens-tu à chaud ?
Je suis déçu, extrêmement déçu. Mais j’ai donné le meilleur de moi même ce matin. Je savais que ce serait dense et qu’il fallait nager autour des 1’46 pour passer. J’ai vu hier le 400 m et ça a nagé très vite dès le matin. Je devais être frais et dispo pour me qualifier. Je sais que je n’ai rien à regretter. J’ai pris du plaisir sur cette course, ça a été dur en fin de course mais j’ai donné mon maximum. C’est dur (soupir).
Que t’as t-il manqué ?
Beaucoup de choses, de la fraicheur physique, une constance sur les dernières saisons, peut-être de la fraicheur nerveuse également. Je n’en sais rien… Débriefer à chaud, c’est extrêmement compliqué. Je suis passé par tellement de choses difficiles ces dernières années, que c’était déjà une victoire en soi d’être ici et de montrer à tout le monde que malgré tout on pouvait changer son étoile, être combatif et c’est ce que j’ai tenté de faire ce matin même si ça ne passe pas. Je suis content d’être ici et d’avoir tenté de défendre mon titre.
As-tu des regrets par rapport aux quatre dernières années ?
Aucun. Je suis content de toutes les décisions que j’ai prises. Je ne peux pas les regretter parce qu’elles sont arrivées à point nommé, à un moment où soit je prenais cette décision, soit c’était ma santé qui était en péril. Partir aux Etats-Unis m’a vraiment sauvé. Ensuite, j’ai pris les décisions de façon très logique. J’ai rencontré des gens formidable dans ma vie, que ce soit à Nice, à Baltimore ou à Mulhouse. Je ne remercierai jamais assez Bob Bowman, dans un premier temps, de m’avoir tiré de ça. Puis après Lionel, toute sa famille, les gens de Mulhouse qui m’ont accueilli et avec qui on a construit ces deux années comme on a pu en se donnant au maximum. On a passé des moments formidables.
Avais-tu confiance avant la course ?
Si je suis dans une compétition, ce n’est pas pour parader et faire le touriste donc il y a forcément une lueur d’espoir en permanence. Je suis un compétiteur, je suis là pour me battre. J’ai tout le temps l’œil du tigre. Comme je savais que ça allait probablement être ma dernière course en individuel à l’international, j’avais à cœur de bien faire les choses donc je me suis donné à fond. Je suis triste que ça ne passe pas mais je serai là pour soutenir Jérémy et je serai également mobilisé pour les copains, pour la France et ce relais 4x200 m.
Ta dernière course en individuel dis-tu. Ta décision est-elle prise ?
Plus ou moins. Il y a encore une course ou deux à nager et puis bien évidemment on verra par la suite mais je pense que c’était ma dernière course en individuel à l’international. En tout cas, c’était mes derniers Jeux Olympiques, c’est sûr. Vu les quatre dernières années que j’ai vécu, si je m’en retape quatre comme ça vous allez me retrouver entre quatre planches donc il ne vaut mieux pas. (Il marque un silence). Ça a été dur, ça a été tellement dur. Je parle beaucoup quand il y a un micro tendu mais je suis quand même quelqu’un d’assez pudique et il y a beaucoup de choses que je garde pour moi. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point ces quatre dernières années ont été difficiles. J’ai vécu des moments de bonheur intense mais sportivement ça n’a pas été une mince affaire et de pouvoir malgré tout être ici, c’est top.
Recueilli à Rio par J. C.